Un Symposium sur l'évolution de l'offre à Paris et New York
15-May-2017 | By: Matthieu Guinebault
Elsa Berry, Co-Founder of Vendôme Global Partners and President of the French American Chamber of Commerce organizes the 2nd Edition of the French American Luxury Symposium in Paris
Après une première édition outre-Atlantique l’an passé, le symposium Paris-New York Luxury Capitals (French-American Luxury Symposium) s’est tenu le 5 mai dans la capitale française. L’occasion d’un échange entre spécialistes sur l’évolution de l’offre luxe des deux villes, dans un secteur soumis à de nouveaux enjeux techniques et «expérientiels».
Paris & New York Luxury Capitals se tenait à la Chambre de Commerce Paris-IDF - Matthieu Guinebault/FNW
« Le luxe est face à de nouveaux consommateurs, de nouveaux comportements, de nouvelles expériences, de nouvelles identités, un nouveau tempo… Le tout étant de répondre à ces enjeux tout en respectant l’ADN propre au luxe », a déclaré en ouverture Elsa Berry, présidente de la FACC-NY (Chambre de commerce franco-américaine de New York) et fondatrice de Vendôme Global Partners.
Le fait de centrer cette journée sur New York et Paris n’est pas un hasard, les deux villes représentant respectivement pour l’industrie du luxe des marchés de 27 et 13 milliards de dollars. «Paris représente plus que tout le Moyen-Orient et la Russie réunis, et New York pèse plus lourd que la Chine dans son ensemble », a insisté le PDG de Luxurynsight, Jonathan Siboni. « Ces deux villes ont une puissance onirique et financière sans pareil pour le luxe, et elles cristallisent les défis du secteur.»
Deux villes marquées jusque dans leur offre par les mutations du marché. « La loi Macron va totalement changer la carte du luxe à Paris », affirme ainsi Véronique Nocquet, directrice France de l’immobilier commercial de JLL, évoquant l'ouverture dominicale comme la source de l’offre luxe rue des Francs-Bourgeois dans le Marais. Pour l’heure, l’offre luxe parisienne a déjà étendu son maillage aux quartiers d’Opéra et d'Haussmann ainsi qu'au boulevard des Capucines. Elle est même entrée en France dans les centres commerciaux avec Beaugrenelle.
«A New York, le shopping de luxe est encore concentré sur Madison Avenue et dans le quartier de SoHo. Et si les gens parlent sans cesse de la Fifth Avenue, il faut prendre conscience qu'elle a probablement cessé d’être une avenue luxe », pour Michael Hirschfeld, directeur retail services US de JLL. « C’est le désir de toutes les marques de trouver le nouveau lieu à succès. Mais ce sont les pionniers qui font le festin, ceux qui suivent n’auront que les restes.»
«L’expérience du client devient à mon avis un élément important dans le choix d’une nouvelle adresse», explique pour sa part Marc Durie, en charge des chaussures masculines Christian Louboutin. Pour ce dernier, les pop-up stores, dernièrement très courus, sont devenus les meilleurs moyens de tester de nouveaux concepts, qui doivent au passage s’adapter à leurs lieux de déploiement, l’expérience client devenant le nouvel objectif majeur. «Il est peut-être temps pour les marques de changer leur histoire, de proposer une approche différente », estime le directeur de Luxury Good Research d’Exane BNP Paribas, Luca Solca. «Sur les dernières années, les marques se sont concentrées sur l’élargissement de leurs réseaux. L’enjeu est devenu autre.»
Passer d'un focus produit à un focus client
Et c’est notamment ce que souligne la directrice des services et des innovations digitales de L’Oréal, Esohe Omoruyi : « Le principal enjeu sur lequel les marques de luxe peinent aujourd’hui, c’est comment faire passer le service au niveau suivant. Acheter ne suffit plus. Le client veut sentir qu’il vit une expérience de luxe. Il nous faut proposer une expérience premium ».
« Le luxe traditionnel est un secteur centré sur le produit, avec la data, il doit se centrer sur le client, confirme Mats Carduner, CEO de Fifty-Five, spécialiste de la data, pour qui trois défis sont à relever : l’analyse de performance des différents canaux de vente, la création d’une vision unique du consommateur en réunissant les données sur ses achats et préparation d’achat on et offline, et une meilleure compréhension des leviers de communication pour décrocher un meilleur retour sur investissement. « On peut même imaginer qu’un jour les marques échangent leurs données », pour le spécialiste.
« Si vous allez chez Nespresso sur les Champs-Elysées, vous vous rendez compte que c’est là la meilleure expérience mode en termes de café. On voit bien que ce phénomène d’expérience se retrouve dans toute l’industrie », analyse de son côté Chris Colyer, vice-président Consumer Goods & Retail de Dassault Systèmes.
D’autres technologies ont plus discrètement été adoptées par le secteur. « Beaucoup de maison de luxe ne communiquent pas sur le fait qu'elles travaillent à partir d'imprimantes 3D, relève la directrice de société spécialisée Prodways, Catherine Gorgé. Ce terme d'imprimante 3D, qui était au départ un peu rugueux, devient une routine pour le luxe. Il va permettre une personnalisation par la morphologie, par l'écriture sur les pièces ou par la création d'éditions limitées. Oui, on a des produits qui sortent finis, mais dans le milieu du luxe, il y a toujours cette intervention de la main. Nous avons l'ambition d'obtenir le label entreprise du patrimoine vivant », conclut-elle.